Amour, gloires et beauté

Prédication prononcée le 8 octobre 2023 dans la paroisse réformée de Bienne, à l’occasion de mon premier culte dans « ma » nouvelle paroisse!
Lectures du jour, selon lectionnaire.ch: Malachie 3,13-20; Matthieu 20,1-16 et Philippiens 1,27-2,4: sur lequel porte la prédication

Amour, gloires et beauté!

Amour, gloire et beauté !
Pas besoin de vous chanter le générique de cette plus de trentenaire série TV ! Un titre accrocheur, qui « claque »…. Tout comme Paul aurait pu rendre jaloux tout Hollywood avec son slogan de la lettre aux Philippiens « Amour, unité et humilité »

Un condensé de la foi chrétienne!

Tout un programme en 3 mots ! Un condensé, l’essentiel de la foi chrétienne résumée dans ce billet de Paul à la communauté macédonienne de Philippes !

Les propos de l’auteur semblent clairs : si ceux qui se réclament vraiment du Christ – les philippiens et nous à leur suite – si vraiment nous tous sommes convaincus de trouver dans l’enseignement et l’action de l’homme de Nazareth encouragement, réconfort et force, alors… ben tout devrait aller pour le mieux dans le meilleur des mondes !

Si vraiment nous vivons selon ce que nous appelons la Bonne Nouvelle, ne serait-il pas alors d’une évidence que toujours,
de manière égale et constante,
avec joie et ravissement,
nous nous mettions au service des autres pour faire de nos communautés des lieux d’entente parfaite, d’amour partagé sans jalousie ni envie, des lieux de don de soi inconditionnel, de confiance absolue ?
Toutes et tous sur la même longueur d’onde ! Plus besoin de chef ! Plus de conflit à l’horizon ! La seule chose qui risquerait de déborder, serait une satisfaisante bienveillance à l’égard de chacun de nos semblables !

Pourtant, malgré ses convictions et son engouement pour le Christ et son message, la communauté de Philippes fait la douloureuse expérience des crises, des oppositions venues de l’extérieur, des dissensions de toute sorte. Elle est marquée par des rivalités, des vexations, et de considérées comme excessives et outrageuses affirmations de soi.

Là, c’est le fantasme des soi-disant idylliques premières communautés chrétiennes qui en prend un coup ! À la lecture de cette lettre de Paul, je peux vous dire que je suis bien contente de venir travailler ici dans la paroisse de Bienne, qui m’apparait quand même bien plus sereine que la communauté des Philippiens de l’époque !

Mais je ne perds pas de vue que même pour nos églises aujourd’hui installées et ici reconnues, l’impératif et l’exigence de la prédication et de la mise en œuvre de l’évangile au milieu de notre monde peut être source de découragement et de tensions face aux difficultés du moment.

Femmes et hommes qui nous réclamons de l’évangile, il nous est nécessaire de nous réapproprier cet appel de Paul à l’amour, l’unité et l’humilité. Et parce que la vie chrétienne n’est pas faite seulement d’un sentiment intérieur, mais bien aussi de l’exercice concret de la mise en pratique des valeurs que nous prêchons, ce slogan, tout agréable qu’il soit à nos oreilles, écorche un peu nos mains quand il s’agit de l’adopter dans nos relations et nos projets.

Tout comme l’expérience déroutante de la rétribution et de la justice des hommes cités dans Malachie ou des ouvriers de la 11e heure, « Amour, unité et humilité » offre une perspective bousculante au bien évident et séduisant « Amour, gloire et beauté ».

Unité

Clairement, notre besoin d’individualité et de réalisation personnelle est heurté par cet appel à l’unité, compris bien souvent comme de la conformité. Reconnaissons-le franchement, personne de nous n’a envie d’être juste un ou une parmi d’autres. Nous avons ce besoin tout humain d’être reconnus dans ce qui fait de nous un être unique, particulier, que l’on différencie de la masse du reste du monde. Et n’est-ce pas là toute la beauté et l’intérêt de la vie ?

« Unité » de pensée ne signifie pas uniformité. Chrétiens, réformés : nous avons la conviction que c’est justement le débat sain, la mise en perspective, l’autonomie de pensée qui constituent les garde-fous aux fondamentalismes de toute sorte, et garantissent certainement des décisions et actions tout sauf tièdes !

Enfin, l’insistance sur l’unité nous rappelle enfin que notre vie se joue toujours AVEC les autres, ces autres que nous sommes encouragés par Paul à « considérer, avec humilité, comme supérieurs à nous »…

Humilité

L’humilité, encore une valeur que nous sommes aussi bien prompts à l’ériger en vertu ultime !

Mais l’humilité souvent comprise comme misérabilisme risque de conduire au dénigrement de soi, au manque d’une nécessaire dose d’estime de soi.

La fausse humilité risque de me paralyser parce que ne me sentant pas à la hauteur, je ne fais rien par peur de me tromper. « Il y a des gens qui ne se salissent pas les mains… parce qu’ils n’ont pas de mains. » écrivait Jean-Paul Sartre. Cette fausse humilité m’empêche d’accepter toute responsabilité sous prétexte que je ne suis pas digne ou capable.

C’est le règne de la médiocrité, de la dévalorisation de soi et d’une culpabilité diffuse.

Qu’y a-t-il de « mal » à reconnaître nos qualités, nos réussites, et à en témoigner autour de nous ? Je suis persuadée que nous aurions beaucoup à gagner – déjà entre nous, mais aussi dans les relations qui nous lient à la société dans laquelle nous vivons – si nous osions dire plus et plus fort nos saines gloires, ces moments de réussite qui sont de légitimes occasions de fierté.

Reconnaître en quoi on est bon, ne fait pas de nous des gens prétentieux pour autant… Finalement, n’y a-t-il rien de plus orgueilleux que de se croire humble ?

L’humilité ne se mesure pas à l’aune de notre seule personne. L’humilité ne se témoigne encore une fois que dans la relation aux autres. L’humilité ce n’est peut-être pas penser moins à soi, mais penser encore plus aux autres !

Et les considérer comme supérieurs à nous…

Considérer l’autre comme plus grand que soi ne signifie pas que je sois toute petite. Il ne s’agit de nouveau pas de se renier ou de se dissoudre dans le flux ambiant !

Mais plutôt de me demander : Est-ce que j’attends encore quelque chose de l’autre ? Est-ce que je l’estime supérieur à moi dans bien des domaines ? Est-ce que j’arrive à discerner en l’autre tout ce qu’il peut m’apprendre ? Qu’est-ce qu’il a de plus que moi et qui pourrait enrichir nos projets communs ? Comment le, la mettre dans les meilleures conditions pour cela ?

Ne sous-estimons pas le pouvoir de l’estime portée à l’autre : il n’y a qu’au contact des autres que j’apprends à reconnaître
ce que je suis et ce que je ne suis pas,
ce que j’ai et ce que je n’ai pas,
ce que je ne peux pas,
ce que je veux,
et ce que je n’ose même pas envisager…

Sans ce partage réciproque, je risquerais fort de passer à côté des dons et des compétences encore à révéler, chez moi, chez les autres.

Au contact des autres, je risquerais peut-être même de découvrir qu’ils apprécient ma compagnie…

Amour, gloires et beauté

Aujourd’hui commence notre aventure commune de vie de foi à traduire dans les engagements et projets de nos paroisses de Bienne et Nidau et au-delà, au milieu, pour et avec ce monde auquel nous appartenons.

Et c’est « Amour, gloires et beauté » que je choisis comme titre ou slogan pour cette affaire !

Un amour juste et bien placé grâce à la reconnaissance mutuelle de nos charismes, compétences, aspirations, rêves !
Nos gloires partagées, nos réussites légitimes, dites et célébrées !
La beauté de tout ce qui est à apprendre et à réaliser !

Amen

2 réponses sur “Amour, gloires et beauté”

  1. Merci!
    Qu’on est loin de la moralisation!
    « Unité »= Être avec
    « Humilité »= Prétendre à… ne fait pas de nous des êtres prétentieux.
    Excellent début!
    Je me réjouis de vous entendre en live!

  2. Merci pour votre retour! Il semblerait que nous allons collaborer très vite pour un culte 4D… Au plaisir!

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